The test was well worth the stress
In this article, Bruegel director Jean Pisani-Ferry takes stock of the results from the bank stress tests were made public in July. While having reservations about the technique to assess the banks, he explains why the tests are crucial in preventing Europe from going the Japanese way.
Les dernières années nous ont rappelé quel est le coût économique d’une crise spasmodique du système bancaire, et combien grande est, en ce cas, l’urgence d’une intervention massive et résolue. Depuis plus d’un an, notamment depuis la publication par le FMI d’évaluations alarmantes, la question se posait de savoir si, comme le Japon il y a dix ans, l’Europe était exposée au risque presque aussi sérieux d’une crise latente, génératrice d’asphyxie économique. C’est à cette question que devaient répondre les stress tests sur les banques européennes dont les résultats viennent d’être rendus publics.
Ces tests consistent à évaluer la solvabilité à venir des banques sous des hypothèses économiques et financières communes. C’est loin d’être une technique sans défaut : résumer la distribution des risques en deux ou trois scenarios plus ou moins gris est forcément arbitraire. En mai 2009 cependant, après la publication de chiffres sur les dix-neuf principales banques et les besoins en capital qui résultaient des tests, le marché financier américain a retrouvé la sérénité qui lui faisait défaut depuis plusieurs mois. Les opérateurs se sont convaincus qu’un nouveau choc resterait gérable et grâce à la publication de données détaillés banque par banque, les rumeurs ont cessé de prévaloir sur les faits.
Les Européens auraient du immédiatement emboîter le pas des Américains, comme le leurs réclamaient économistes et analystes de marché. Mais partie par réticence à l’égard de la transparence requise par l’exercice, partie en raison de rivalités entre superviseurs européens et nationaux, ils ont perdu une année avant de s’y résoudre dans l’urgence face au nouvel accès de fièvre induit par les alarmes sur la solvabilité des Etats.
Le débat est maintenant de savoir si les tests suffisent à rassurer ou s’ils offrent une image embellie de la situation financière. Ils ont été critiqués pour n’avoir mis en évidence que 7 banques en difficulté sur les 91 testées, et un besoin en capital total de 3,5 milliards d’euros seulement. On leur a reproché (à tort) des scénarios économiques insuffisamment pessimistes, et (à juste titre) une définition trop laxiste de la solvabilité ou une prise en compte seulement partielle des risques sur les titres d’Etat (techniquement, seul le risque de dépréciation de leur valeur de marché a été pris en compte, pas celui d’un défaut effectif). Cependant l’information détaillée fournie avec les résultats est généralement suffisante pour permettre maintenant aux analystes faire leurs propres évaluations. Goldman Sachs, par exemple, a immédiatement estimé ce qu’auraient donné les tests sous des hypothèses différentes, et aboutit à des résultats plutôt rassurants : avec une définition plus exigeante de la solvabilité ou la prise en compte d’un défaut partiel de la Grèce, davantage de banques seraient en faillite et les besoins en capital seraient accrus, mais dans des proportions encore gérables.
La vraie valeur des tests est ainsi dans la transparence accrue dont ils s’accompagnent - cette même transparence à laquelle s’étaient jusqu’à présent refusés les Européens, conduisant les marchés à soupçonner qu’ils avaient quelque chose à cacher. Malheureusement elle n’est pas encore complète : si l’Espagne a donné tous les chiffres pour toutes ses banques, les superviseurs allemands s’en sont tenus au strict minimum, notamment en ce qui concerne l’exposition au risque de défaut souverain.
Plus largement, si les hypothèses sont communes, l’évaluation banque par banque est restée du strict ressort de superviseurs nationaux partagés entre le devoir de faire la vérité et le souhait de montrer que leur secteur bancaire est en bonne santé. Il aurait été préférable d’aller un pas plus loin dans le contrôle de l’homogénéité des résultats.
Il n’empêche : ces tests sont un progrès, et ils suggèrent que l’Europe n’est, finalement, pas condamnée à suivre le Japon sur la voie de la stagnation. C’est une bonne nouvelle.
Jean Pisani-Ferry est économiste et directeur de Bruegel, centre de recherche et de débat sur les politiques économiques en Europe. Courriel : chronique[at]pisani-ferry.net.
A version of this op-ed was published by Le Monde.